Lakhdar Sennan : une voix une œuvre

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Lakhdar Sennan : l’auteur de la magistrale chanson « Adrar-iw », cette fresque verbale du vécu kabyle sublimé, revient avec un nouvel album « Dayni kan ». Une œuvre commise comme une fragmentation d’où s’engouffre une poésie exquise portée par des mélodies qui transporte jusqu’au tournis. Tissée tel un chapeau de paille, les vers s’enlacent et forment des tresses cousues d’un fil rare. Portée  à l’oreille, la magie s’opère et s’installe dans l’esprit.

Le nouveau album se veut à la fois une complainte, un hymne à l’amour et un hommage au barde de la chanson kabyle disparu Matoub Lounès. En observateur aguerri,  il pointe les tares charriées par ses contemporains. Il cible l’opportuniste, l’arriviste et tous les néo- tous-azimuts qui renient les valeurs ancestrales. Le crooner kabyle ne déroge pas à la règle de ces précédents albums. L’amour sincère et limpide,  tient une place prépondérante  dans cette œuvre.

Avant tout, l’œuvre est authentique. Elle est puisée d’une source si haute que peu d’élus  arrivent à atteindre. Authentique parce que l’artiste est l’émanation de sa société. Tel un pèlerin déchaussé, il s’engage dans un long cheminement vers les siens, vers son public. La carrière de Lakhdar est vide d’artifices et d’effet du Buzz. C’est que du beau, du vrai et que du naturel. Certes Le chemin était long et fastueux. Mais jamais il a molesté le fruit pour accélérer le mûrissement. Il sait son terreau fertile, son soleil généreux  et la source inépuisable

Le chant de Lakhdar est un instantané dérobé  sur le vif à un passé lointain. Il est le crépitement de la neige sous les pas du berger emmitouflé dans un vieux avernus usé. Il est la sérénité qui s’immisce dans les cœurs les nuits d’orage quand la tempête déchaînée se dispute les tuiles aux maisonnées. Il est la convivialité des veillées nocturnes dans les pressoirs à l’huile d’olives chauffé aux noyaux écrasés. Il est le souffle du vent qui s’infiltre dans les interstices des vielles bâtisses en pierres revêtues de terre ocre et coiffées de chaume. Il est l’écho des voix des exilés qui retentissent sur les cols Il est le chant des cigales, les fleurs des figues de barbarie en début de saison quand le coquelicot éclore et colorie champs et vergers. Il est la vie dans une mémoire kabyle torturée.

Il  pose des mots sans les travestir. Il  compose des airs sans penser aux hanches élancées, aux captations fulgurantes propres à la chanson micro-onde. Il ne se contente pas le succès saisonnier du non-stop, qui une fois lassé  traverse telle une étoile, filant vers l’oubli. L’œuvre de Lakhdhar Sennan irrigue les sillons  de la chanson kabyle dont il est l’un des meilleurs ambassadeurs.

Lakhdar Sennan se produira  dimanche 6 décembre 2015, à partir de 15h, au café de Paris sis au  158 rue Oberkampf, métro Ménilmontant, ligne 2

Zahir Boukhelifa pour Tamurt

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